Hotel Designer - Hotel Architect – Maidenberg Architecture

L’Hôtellerie Restauration

L’architecte d’intérieur, clef de voûte de la rénovation

Mars 2010

« Notre métier peut se comparer à celui de metteur en scène », déclare l’architecte d’intérieur Jean-Philippe Nuel. Son confrère Philippe Maidenberg ajoute « Des mises en scène certes, mais toujours soumises aux contraintes techniques imposées par les réglementations. » La créativité demeure pourtant leur première qualité. Ils donnent les tendances de l’hôtellerie. « Sans être péremptoire, observe Laurent Moreau, on peut dire que les couleurs claires représentent une tendance forte dans les rénovations. » Certaines réalisations récentes l’ont démontré, à l’image des hôtels conçus par Carole Picard pour le groupe Asset Management, tel le BLC, dans le Xle arrondissement de Paris, avec sa mise en valeur exclusive du blanc.

Aménagement des espaces

Pourtant, au-delà du jeu des couleurs et des matériaux, certains préfèrent parler d’espaces et d’organisation. « La vraie tendance actuelle dans la rénovation réside dans l’aménagement des espaces, affirme Jean-Philippe Nuel. Je fais un parallèle entre la vie quotidienne et celle à l’hôtel puis je le traduis toujours en termes d’organisation d’espace. » En revanche, si le côté esthétique est important, il n’est que la partie émergée de l’iceberg – « 20 % de notre travail, estime Laurent Moreau. » Car les contraintes réglementaires sont de plus en plus importantes, entre les impératifs environnementaux et ceux liés à la sécurité et à l’accessibilité. En outre, la communication entre les différentes administrations complexifie le travail de l’architecte. « La réglementation concernant les normes environnementales dans la construction – comme la démarche HQE – est respectée par tous et tous les immeubles sont en principe zéro carbone, souligne Jean Philippe Nuel. Mais il est souvent difficile, si l’on ne prévoit pas une rénovation totale, de prendre en compte certains aspects de la réglementation comme l’économie d’eau, d’énergie, les déchets… »

Jongler avec les contraintes

« Les contraintes les plus importantes proviennent de la réglementation en matière d’accessibilité, d’autant que les contrôles vont souvent au-delà de la réglementation », constate Philippe Maidenberg. Comment en effet ouvrir des portes de 90 cm dans des bâtiments en béton, pour les mettre aux normes ? Des systèmes de dérogation existent, mais ils ne peuvent être garantis. Les assurances auxquelles souscrivent les architectes font office de garde-fous, mais pour éviter tout problème, il n’est pas rare que ceux-ci fassent appel en amont à des bureaux de contrôle extérieurs.

Autre sujet de frustration pour les architectes d’intérieur : les éclairages. Eu égard à la nouvelle réglementation, les hôtels doivent émettre un nombre de lux suffisant par mètre carré. Là encore, certains vont tester eux-mêmes l’intensité lumineuse à l’aide d’un appareil spécifique, alors que d’autres demandent l’avis d’experts. Mais tous rejoignent Christine Gero quand elle déclare que « l’hôtellerie est faite d’ambiance, et trop de lumière tue l’ambiance ». Et si les LED sont aujourd’hui incontournables, ils présentent deux inconvénients majeurs : ils ne donnent pas assez de lumière et demeurent onéreux. Sans parler du problème de recyclage des lampes basse consommation.

Le coût des rénovations

Enfin, quoi de plus audacieux pour un architecte que de travailler sur un bâtiment ancien qu’il réhabilitera en lui donnant une autre fonction ? Pour ces anciennes prisons, tribunaux désaffectés ou encore hôpitaux abandonnés destinés à être transformés en hôtels, ce sont les architectes des Bâtiments de France qui interviennent. À Nantes, pour la transformation du palais de justice en Radisson, « cela n’a pas vraiment posé de problème, indique Jean-Philippe Nuel, car il s’agissait d’un bâtiment du XIXe siècle. Tandis que pour l’Hôtel-Dieu à Marseille, bâtisse du XVIIIe siècle, il était impératif de respecter les escaliers et les façades. »

Ces rénovations ont un coût souvent considérable mais « l’important est de savoir ce que l’on inclut dedans, confie Laurent Moreau ». Pour un hôtel 3-4 étoiles, d’une capacité de 50 à 100 chambres, une rénovation totale – incluant plomberie, salles de bains, modifications des espaces, aménagements intérieurs, sécurité, accessibilité et décoration – se situe dans une fourchette de 70 000 à 100 000 € par chambre (plutôt 120 000 € en 4 étoiles), estiment les cinq architectes. Sans compter leurs honoraires. Évidemment, dans l’éco-chic, on sera largement en dessous. « La pire incertitude pour nous, en matière de rénovation, estime Jean-Philippe Nuel, réside dans les planchers et les surfaces du sol. Il faut donc toujours prévoir un devis spécifique, que l’on utilisera ou non. »

Véritables ensembliers et créateurs d’espaces de vie, les architectes d’intérieur sont là pour sublimer les souhaits de l’hôtelier tout en respectant la vocation de son établissement, à savoir répondre aux besoins du client. Ils sont aussi des garants indispensables pour éviter bien des catastrophes dans des opérations lourdes.